Créé(e) 24/02/2025 Mis à jour 26/02/2025
24 fév
2025

Dans un article paru dans Science Advances, des chercheurs du Laboratoire d'Océanographie de Villefranche, la Station Biologique de Roscoff, l'Université de Southampton et du Massachusetts Institute of Technology ont simulé grâce au modèle global Darwin la distribution dans l’Océan des trois principaux types pigmentaires de Synechococcus (spécialistes du bleu ou du vert et acclimateurs chromatiques) et démontré que cette diversité lui a permis de coloniser tous les environnements lumineux.

Le phytoplancton, ces algues microscopiques à la base des chaines alimentaires en milieu marin, utilise des pigments pour capturer l'énergie lumineuse nécessaire à la photosynthèse. La quantité et la qualité spectrale de la lumière disponible pour ces organismes varient énormément en milieu marin aussi bien le long des gradients côte-large qu’avec la profondeur et la saison, influençant ainsi la couleur de l’eau. Pour s’adapter à ces variations, les organismes du phytoplancton présentent une grande diversité de pigments captant la lumière et certains ont même développé une capacité fascinante appelée « acclimatation chromatique » qui, à l’instar des caméléons, leur permet d’ajuster leur composition pigmentaire en fonction de la couleur de la lumière ambiante, et ainsi d’optimiser l’absorption d’énergie lumineuse. La cyanobactérie Synechococcus, l'un des deux organismes photosynthétiques les plus abondants de l'océan, est aussi celui qui présente la plus grande diversité pigmentaire. De ce fait, c’est un modèle d’étude idéal pour comprendre l’adaptation du phytoplancton aux variations de la couleur de l’eau. Dans un article à paraître dans la revue Science Advances, des chercheurs du Laboratoire d'Océanographie de Villefranche (LOV), de la Station Biologique de Roscoff (SBR), de l'Université de Southampton et du Massachusetts Institute of Technology (MIT) ont collaboré à l’étude de la distribution dans l’Océan global des trois principaux types pigmentaires de Synechococcus, à savoir les spécialistes du bleu, les spécialistes du vert et les acclimateurs chromatiques. Les chercheurs ont utilisé le modèle Darwin du MIT, l’un des modèles 3D les plus performant au monde pour simuler le fonctionnement de l’Océan mondial, et notamment les variations spatio-temporelles de la couleur de l’eau. Ils ont intégré dans ce modèle les propriétés d’absorption de la lumière de chacun des types pigmentaires de Synechococcus. Ils ont ainsi démontré que grâce à sa remarquable diversité pigmentaire, cet organisme a pu coloniser l’ensemble des environnements lumineux, du bleu au vert, disponibles dans le milieu marin et ainsi accroitre la biomasse totale de sa population.

Cette étude souligne l'importance de prendre en compte les traits fonctionnels, tels que la pigmentation, pour mieux comprendre la distribution du phytoplancton dans l’océan global, en particulier dans le contexte du changement climatique, qui modifie la couleur de l’eau et donc l’environnement lumineux où vivent les communautés phytoplanctoniques.

 

 

Fig. Distribution moyenne annuelle de la biomasse de Synechococcus (panneau du haut) et contributions relatives (%) des trois types pigmentaires (panneaux en bas). Ces derniers incluent les spécialistes du bleu (à gauche) qui dominent dans les zones centrales des océans pauvres en nutriments, les spécialistes du vert (au centre) qui dominent dans les régions riches en nutriments et/ou côtières, et les acclimateurschromatiques (à droite) dominants dans les zones de transition entre les régions de prédilection des deux spécialistes mais également abondants dans les zones tempérées soumises à une forte saisonnalité. 

Crédit : Francesco Mattei, Laboratoire d'Océanographie de Villefranche-sur-Mer (UMR 7093, Institut de la Mer de Villefranche)

 

Cette étude a été financée grâce au projet ANR EFFICACY (ANR-19-CE02-0019) dont les co-porteurs sont F. Partensky & L. Garczarek (Station Biologique de Roscoff).

 

Référénce

Chromatic acclimation shapes phytoplankton biogeography.

Mattei F, Hickman AE, Uitz J, Dufour L, Vellucci V, Garczarek L, Partensky F, Dutkiewicz S

Sci. Adv.11,eadr9609(2025).DOI:10.1126/sciadv.adr9609

Publication en ligne : https://www.science.org/doi/10.1126/sciadv.adr9609