Créé(e) 16/12/2014 Mis à jour 15/02/2017
16 déc
2014
Tracing the trans-Pacific evolutionary history of a domesticated seaweed (Gracilaria chilensis) with archaeological and genetic data

Les auteurs : Marie-Laure Guillemin, Myriam Valero, Sylvain Faugeron, Wendy Nelson & Christophe Destombe. DOI: 10.1371/journal.pone.0114039

Au Chili, une espèce d’algue rouge dénommée Gracilaria chilensis fait l’objet d’une intense aquaculture depuis la fin des années 1980.

Une étude publiée le 2 décembre dans la revue PlosOne par des chercheurs de l’Unité internationale de recherche franco-chilienne Biologie évolutive et écologie des algues, créée en mars 2014, révèle que cette algue n’est pas originaire du Chili comme son nom tend pourtant à le laisser croire… Ces travaux montrent par ailleurs une réduction drastique et récente de la diversité génétique de Gracilaria chilensis résultant probablement de sa culture massive le long des côtes du Chili.

En l’espace de plusieurs milliers d’années, l’Homme n’a cessé de domestiquer les animaux et les plantes qui l’entourent. Il en va de même pour Gracilaria chilensis, une espèce d’algue rouge présente le long des côtes chiliennes. Cultivée intensivement depuis la fin des années 1980 pour produire de l'agar-agar, un gélifiant qui entre dans la composition de divers produits alimentaires, l’espèce était déjà consommée par les premiers habitants du Chili.

« Des fouilles entreprises il y a quelques années, sur un site archéologique situé à une soixantaine de kilomètres de l’Océan Pacifique, ont révélé des vestiges d’algue vieux de 15.000 ans portant des traces de cuisson et de mastication », explique Myriam Valero, chercheuse au sein del’Unité internationale franco-chilienne Biologie évolutive et écologie des algues de la Station biologique de Roscoff (CNRS / UPMC). En croisant ces données archéologiques à des analyses portant sur la diversité génétique des populations actuelles de Gracilaria chilensis, la scientifique et son équipe ont pu démontrer que l’espèce était, non pas originaire du Chili, mais de Nouvelle-Zélande. La colonisation des côtes chiliennes par cette algue aurait eu lieu vers la fin des dernières glaciations, il y a plus de 15.000 ans de cela. Le rôle joué par l’Homme dans l’extension de l'espèce dès son arrivée sur ce nouveau continent reste toutefois à élucider.

...la scientifique et son équipe ont pu démontrer que l’espèce était, non pas originaire du Chili, mais de Nouvelle-Zélande..

La comparaison de la variabilité génétique entre les populations naturelles de Gracilaria chilensis de Nouvelle-Zélande et du Chili a par ailleurs permis aux chercheurs de mettre en évidence une réduction significative de la diversité au sein des populations chiliennes. « Celle-ci résulte certainement de la surexploitation récente de l‘espèce mais elle pourrait aussi être due à l’effet de fondation, c’est-à-dire au fait qu’un faible nombre d’individus sont parvenus à traverser l’Océan Pacifique pour coloniser ensuite les côtes du Chili », souligne Myriam Valero. Si les marqueurs génétiques utilisés dans l’étude ne permettent pas pour l’heure, de distinguer la responsabilité de la culture intensive contemporaine de l’effet fondateur historique dans la perte de variabilité génétique de Gracilaria chilensis, les scientifiques comptent bien poursuivre leurs investigations pour en avoir le cœur net. En employant d’autres méthodes d’analyse leur donnant accès à une plus grande partie du génome de l’algue et donc à davantage de diversité génétique, ils espèrent ainsi mieux caractériser l’impact de sa domestication et de l’aquaculture intensive. Quoi qu’il en soit, les populations chiliennes de Gracilaria chilensis étant déjà très appauvries génétiquement, les pratiques actuelles de culture intensive par multiplication clonale pourraient bien conduire à l’extinction de l’espèce au Chili.

 

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Tracing the trans-Pacific evolutionary history of a domesticated seaweed (Gracilaria chilensis) with archaeological and genetic data

Par Marie-Laure Guillemin, Myriam Valero, Sylvain Faugeron, Wendy Nelson & Christophe Destombe.

DOI: 10.1371/journal.pone.0114039